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TrOPICS, hors série n° 2 :

TrOPICS, hors série n° 2 : "Bonheur et mièvrerie – Dire le bonheur : gageure littéraire ?"

Publié le par Marc Escola (Source : Université de La Réunion)

 

TrOPICS. Revue électronique des Lettres et Sciences Humaines de l'Université de La Réunion

Université de La Réunion, 2018

EAN13 : ISSN22713131.

Hors-série n° 2, été 2018 :

Bonheur et mièvrerie – Dire le bonheur : gageure littéraire ?
Sous la direction de Guilhem Armand et de Yann Mével

 

La revue TrOPICS est heureuse de vous annoncer la parution d’un numéro spécial, qui correspond aux actes d’un colloque international en deux temps qui s’est d’abord déroulé à Sendai, à l’Université de Tohoku, lors d’une table ronde organisée par Yann Mével au Congrès international de la Société Japonaise de Langue et Littérature Françaises les 22 et 23 octobre 2016, et à l’Université de La Réunion, les 18 et 19 novembre 2016, lors d’un colloque organisé par Guilhem Armand dans le cadre de l’EA DIRE.

Les contes de fées, après avoir entraîné leur héros – le plus souvent innocent – à travers de terrifiantes aventures, s’achèvent par le traditionnel « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ». L’expression du bonheur, des plus conventionnelles, se limite à quelques lignes laissées en suspens. Libre au lecteur d’imaginer la suite, hors de question de la conter. C’est que narrer ou représenter les moments heureux semble relever de cette littérature facile, qui mérite à peine le nom de littérature. Les « belles histoires d’amour » qui finissent bien relèvent du roman de gare, ou rappellent la série « Arlequin ». Mais peut-on seulement y associer un titre d’ouvrage ou un auteur ayant marqué son époque, si ce n’est pour s’en moquer ? Les ouvrages de Marc Lévy, voire ceux de Paolo Coelho, véritables recueils de citations sur le bonheur, sont bien souvent associés à la notion péjorative de mièvrerie. Dans le théâtre classique français, la tragédie est un genre noble bien au-dessus de la comédie. Encore celle-ci a beau s’achever d’heureuse façon – et la fin peut s’avérer ambiguë, si l’on pense, par exemple au Misanthrope – l’histoire représentée sur scène ne l’est jamais : un avaricieux spolie sa propre famille, un barbon séquestre une jeune fille pour l’épouser, un prince s’amuse à isoler des jeunes gens dès l’enfance pour mener une expérience sur l’amour... Le drame sérieux, tout centré sur le pathétique, s’achève généralement sur une explosion de joie qui apparaît comme le début d’un bonheur nouveau et durable. Mais cette fin contribue fortement à la dépréciation du genre, comme si seuls le malheur ou l’ironie pouvaient avoir une valeur artistique. Même les récits d’enfance, de cette période traditionnellement perçue comme heureuse et innocente, ne semblent avoir d’intérêt que si celle-ci est malheureuse ou qu’a contrario elle nourrit la nostalgie présente du sujet. Inversement, n’y a-t-il pas une certaine complaisance du littéraire dans le malheur ? A la noblesse du désespoir, s’opposerait le bonheur, étrangement devenu ignoble – au sens étymologique – en littérature.

Cette exclusion paradoxale – et peut-être simplement apparente – du champ littéraire pose un certain nombre de questions, à commencer par celle de ses raisons. Pourquoi le bonheur, objet de tant de philosophies, est-il « indicible » ? L’explication relève-t-elle justement de la philosophie : il s’agirait d’un concept trop complexe et donc l’art ne saurait l’exprimer ? Ou bien d’une conception littéraire : un objet trop « bas », sans profondeur, relativement au malheur – dont la représentation peut entraîner la catharsis – ou à la perspective critique qui a une vertu pédagogique ?

Les contributions à ce dossier apportent des éléments de réponse en se concentrant sur des auteurs ou des œuvres du XVIIIe siècle à nos jours.

Sommaire

I- Des Lumières aux lendemains de la Révolution : bonheurs et détours

Guilhem Armand : « Savoir et bonheur au siècle des Lumières : tensions et intentions » Colas Duflo : « Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Les morales eudémonistes du roman libertin à ambition philosophique » Jean-Michel Racault : « "Littérature mièvre" contre "littérature féroce" : Bernardin de Saint-Pierre et Sade romanciers des infortunes de la vertu » Carpanin Marimoutou : « La Révolution comme prologue au bonheur : une lecture d’Ourika de Claire de Duras »

 

II- Bonheur comptant pour rien ? les ambiguïtés du contemporain

Yann Mével : « (Ré)inventer le bonheur après Beckett » Noro Rakotobe D’Alberto : « Ce que chacun voit et nomme "bonheur" selon Nathalie Sarraute » Marc Arino : « Dire le bonheur, ou la suspension momentanée du tragique dans l’œuvre tremblayenne » Myriam Kissel : « Bonheur d’écrire-bonheur de lire : le miroir de Facebook. Le cas d’Agnès Martin-Lugand »