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Tenir debout dans les arts de la scène (Arras)

Tenir debout dans les arts de la scène (Arras)

Publié le par Romain Bionda (Source : Anne Lempicki)

Tenir debout dans les arts de la scène

19 Mai 2017

Journée d’étude organisée par Marie Garré Nicoara et Anne Lempicki

Équipe interne Praxis et esthétique des arts - Laboratoire Textes et Cultures (EA 4028)

Université d’Artois (Arras)

 

   La journée d’étude Tenir debout dans les arts de la scène, qui aura lieu le 19 mai 2017, fait suite à d’autres manifestations scientifiques organisées par notre équipe de recherche, notamment le colloque « Corps, prothèse, hybridation » (décembre 2011) et la journée d’étude « Corps mouvant, corps en mouvement : danse et animation » (février 2015).

   Cette journée propose d’observer la posture debout dans les créations scéniques (théâtre, danse, marionnette et cirque), ou comment cette posture élémentaire, significative de l’humanité et point de départ de tout mouvement se trouve mise en jeu et pensée à même le plateau, à même le corps.

   Position inconsciente au quotidien, elle devient l’occasion d’une interrogation constante et de modulations variées sur les scènes contemporaines. Ce qui se présente comme ordinaire devient lieu de recherches faisant apparaître une certaine plasticité du corps.

   La figure de l’artiste en « funambule » comme envisagée par Georges Didi-Huberman interroge les notions d’équilibre, de déséquilibre, invitant ainsi à une pensée du corps dans toute sa fragilité, « un corps instable, [à] un espace fuyant, [à] un regard fulgurant [1]».

 

   On s’intéressera à la posture debout, comme à la verticalité en tant que motifs, thématiques opérantes dans le champ des écritures et pratiques scéniques :

   Si on peut, a minima, appréhender la posture debout en scène comme fondatrice de la relation scène-salle, comme nous l’y invite Kantor[2], on peut aussi être tenté de s’interroger sur ce que dévoilent les créations lorsqu’elles convoquent un imaginaire de l’envol et de la transcendance (dans la lignée de la pensée de Bachelard).

   Comment envisager cette verticalité dans l’espace scénique, qu’elle passe par des dispositifs d’élévation comme dans le « théâtre vertical » de Mélissa Van Vépy, ou que les artistes explorent la suspension et l’illusion d’apesanteur (Sous le vertige, Attractions plurielles de Kitsou Dubois, spectacles et installations de magie nouvelle de la compagnie 14 :20, scènes aériennes chez Philippe Genty) ?

   Le champ des écritures dramatiques destinées au jeune public s’avère un territoire fécond pour penser la question de la verticalité : que ce soit du côté des formes du « grandir » qui traversent ces textes, ou des espaces dramatiques qui surplombent l’enfant (chez Jon Fosse, notamment), comme des vertiges du corps, des sens, de l’espace dans les dramaturgies adolescentes.

   Notre attention se portera également sur les modalités des écritures scéniques du tenir debout :

   On s’intéressera par exemple aux démarches d’artistes qui inventent d’autres modalités de se tenir debout, qu’ils soient dans une quête, un refus ou une inversion de la verticalité -par le biais de prothèses, de formes d’hybridation du corps- ou qu’ils s’évertuent à la déjouer (comme chez Ilka Schönbein où les postures de manipulation ne passent quasiment jamais par la station debout). Un focus sur le pied, la jambe, la colonne vertébrale peut ainsi être envisagé.

   Il s’agira d’explorer la verticalité, de l’enfouissement à l’envol, en interrogeant aussi le mouvement arrêté, l’élan stoppé : figure du gisant chez Nathalie Pernette, It’s a Draw/Live feed-Trisha Brown, spectacles « assis » (Stoel-Caroline Cornélis/Cie Nyash), ou encore ceux qui, s’effondrant, perdent forme humaine (telles les figures au ras du sol dans Le but de Roberto Carlos de Michel Simonot ou Pochade millénariste d’Eugène Durif).

   Certains artistes envisagent le corps également dans un certain effondrement, qu’il s’agisse de ruptures brutales (Wim Vandekeybus, Gisèle Vienne) ou de flux, selon l’acception labanienne, proches du glissement, de l’élasticité de la matière (Accidens-Samuel Lefeuvre ; Café Müller-Pina Bausch). Que nous dit ce corps au risque du déséquilibre, du vertige, de la claudication ?

   Comment les figures s’érigent-elles sur scène et affirment leur humanité par cette station verticale ? Comment cette humanité prend-elle corps dans les arts de la marionnette où les corps sont troués, incomplets, dans la majorité des cas sans jambes ni pieds ? Nous interrogerons les formes du tenir debout à deux et la dimension relationnelle du porter chez les danseurs, interprètes-marionnettistes et circassiens. Aux extrémités des âges de la vie (enfance et vieillesse), dans l’apprentissage ou la restauration de la verticalité, tenir debout se fait à deux, ensemble. Ainsi de la démarche d’Alexandre Fray, acrobate et porteur, qui écrit à partir de ses expériences de porters de personnes âgées et « redécouvre la verticalité et la bipédie comme acte acrobatique » (Projet grand- mères de la compagnie Un loup pour l’homme) ou de Julika Mayer qui collecte les paroles de vieilles dames en maison de retraite et en fait danser les effigies hyperréalistes (Là Où théâtre, Des nouvelles des vieilles).  

 

La durée prévue des communications sera de 20 minutes.

Les propositions de 3000 caractères maximum (espace compris) seront accompagnées de quelques lignes de présentation bio-bibliographique de l’auteur, et seront à envoyer au format PDF ou .doc avant le 22 mars 2017 à Marie Garré Nicoara (marie.garrenicoara@yahoo.fr) et Anne Lempicki (anne.lempicki@gmail.com).

 

[1] Alain Mons, « Le corps dérobé », in Terrain, « Danser », n°35, septembre 2000, p.110.

[2]  Le Théâtre de la mort, 1977, textes réunis et présentés par Denis BABLET, p.28 : « Voici que du cercle commun des coutumes et des rites religieux, des cérémonies et des activités ludiques QUELQU’UN est sorti qui venait de prendre la décision téméraire de se détacher de la communauté culturelle. (…) Essayons de nous représenter cette situation fascinante : EN FACE de ceux qui étaient demeurés de ce côté-ci, un HOMME s’est dressé EXACTEMENT semblable à chacun d’eux et cependant (par la vertu de quelque « opération » mystérieuse et admirable) infiniment LOINTAIN, terriblement ETRANGER, comme habité par la mort, coupé d’eux par une BARRIERE qui pour être invisible n’en semblait pas moins effrayante et inconcevable (…) Nous devons rendre à la relation SPECTATEUR / ACTEUR sa signification essentielle. Nous devons faire renaître cet impact originel de l’instant où un homme (acteur) est apparu pour la première fois en face d’autres hommes (spectateurs), exactement semblable à chacun d’entre nous et cependant infiniment étranger, au-delà de cette barrière qui ne peut être franchie. »