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La dimension documentaire dans les arts (dir. S. Sidaoui)

La dimension documentaire dans les arts (dir. S. Sidaoui)

Publié le par Romain Bionda (Source : Sonia Zlitni Fitouri)

Appel à articles
La dimension documentaire dans les arts

Coordination du dossier par Sihem Sidaoui (Univ. de la Manaouba, Tunisie)
Publication assurée par l'UR IMIAC (Univ. de Tunis/FSHST)

Dans un chapitre intitulé « Petit éloge du documentaire » de son livre Styles, critiques de nos formes de vie, Marielle Macé qualifie le documentaire du « plus contemporain des arts contemporains parce qu’il vise le présent, un présent tout vibrant d’histoires, de traces, d’anticipations, d’imaginations ; mais surtout parce qu’il assume cette façon de se rapporter à la vie […], et qui me semble toucher au vif de nos façons de vivre aujourd’hui le politique, ajoute-t-elle. » (p. 310).

Ces dernières années, écrire, filmer, photographier la vie (Cf. Annie Ernaux, Écrire la vie, Gallimard, 2011.) ou à partir de la vie est mis en avant dans des projets qui partent ou se basent entièrement sur des documents : « document-personne », « document-trace », faits divers, témoignages, espace gardant en lui des traces de la vie ou de l’Histoire… L’écriture est ancrée dans cette matière, enracinée dans la vie mais pour s’élancer bien plus loin, pour s’en décrocher et y revenir afin de mieux la percevoir, l’analyser, la comprendre après en avoir fait une expérience[1] particulière.

L’écriture documentaire telle que nous l’envisageons n’exclut pas la fiction. Le documentaire ne se substitue pas au réel, il n’en est pas une restitution mais une représentation, une proposition de monde, une démarche. La question du genre est en soi très problématique surtout quand nous regardons l’évolution des films documentaires à travers le temps. Les frontières qui séparent le documentaire de la fiction s’estompent et se brouillent de plus en plus comme c’est le cas d’ailleurs pour les films de fiction contenant d’une manière ou d’une autre une part de documentaire.

Pour le cinéma, Néoréalisme, Nouvelle Vague l’ont bien montré en filmant dans des décors naturels et des lieux marqués par la trace de l’Histoire, parfois au cours même de son avènement ou juste après tels Rome ville ouverte ou Allemagne année zéro de Rossellini, tels les télégraphes, minitels et autres objets qui n’existent plus aujourd’hui que dans les films, de Truffaut par exemple.

En littérature, au cinéma ou au théâtre comme dans la Photographie, il y a toujours une part de « document » et une part de fiction, de configuration, de mise en scène. La tendance à lier la fiction au scénario imaginé et le documentaire à l’authenticité du fait réel est erronée. Pour devenir un art, l’écriture documentaire a dû se débarrasser de son côté « documentaliste ». Contrairement à ce qu’on peut croire, le documentaire n’est pas une copie du réel, une tranche de vie, une preuve : (Document, au sens étymologique renvoie à la preuve juridique ou religieuse), ils’éloigne le plus possible de ce sens-là car il est exploration de l’inconnu plutôt qu’affirmation ou attestation du déjà-là. Un bon documentaire ouvre le monde, le décloisonne, fait entrer cette part d’étrangeté du réel, ce reste que nous ne pouvons intégrer dans nos codes et nos lois, il donne vie à notre réel en le sortant de ses cadres, de ses représentations admises… L’écrituredocumentaire n’est pas celle du reportage, elleimplique la créativité, un choix de mise en scène, un dispositif particulier. Elle est réinvention, même du passé :

«  Tout cinéaste se penchant sur les images du passé peut faire sienne la formule de Chris Marker dans Sans Soleils : « on ne se souvient pas, on récrit la mémoire comme on récrit l’Histoire. »[1]

 

Nous vous invitons à produire des articles autour de la question du documentaire dans toutes sortes d’arts, le documentaire en question dans la photographie (Barthes dans La Chambre Claire. Note sur la photographie, Gallimard, 1980. Edgar Morin dans Le cinéma ou l’homme imaginaire, Éditions de Minuit, 1956.), la question documentaire dans des textes écrits : romans, nouvelles, autofictions, journaux intimes publiés, la question du documentaire dans le cinéma remettant en question les frontières classiques entre les catégories de genre, fiction d’un côté, documentaire de l’autre. Une vague de films, de documentaires poétiques (Chantier A, Bla cinéma, La Nuit et l’enfant, Révolution Zendj, Atlal, Nous Sommes là, Révolution moins 5, Bidoun, Bidoun 2,  Babylone ou The last of us…) montrent bien la fluctuation de ces frontières entre fiction, cinéma documentaire, cinéma expérimental[2]

Ceci pourrait aboutir à des questionnements tels que les raisons de cette recrudescence et de ce besoin  pressant de documentaire aujourd’hui. Que nous révèle-t-il sur notre monde, de quelle nécessité historique en est-il le symptôme ?

Axes

  • Dimension documentaire dans la littérature et le théâtre
  • Dimension documentaire et photographie
  • Dimension documentaire et cinéma

Dernier délai pour l'envoi des articles : 30 janvier 2019
Adresse : ssidaoui@yahoo.fr.

Indications techniques

1- Article : 
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Les articles sont soumis au comité de lecture.

[1] Jean Breschand, Le Documentaire, l’autre face du cinéma, Les petits cahiers, 2002.

[2] Saad Chakali, Anais Farine, Algérie(s), chantiers d'expérimentation documentaire.

[1]  Jean-Louis Comolli : « Pourvu qu'il dure un peu, je propose de considérer un tournage documentaire comme un apprentissage commun aux filmeurs et aux filmés. Nous apprenons ensemble à faire un film. Non seulement ''l'observateur fait partie de l'observation" mais ''acteurs'' et ''observateurs'' finissent par se confondre. Ce sont les effets de cette confusion qui sont enregistrés. C'est pourquoi les films documentaires racontent avant tout leur histoire, celle de leurs propres conditions de réalisation ». Jean-Louis Comolli  in Corps et cadre. Cinéma, éthique, politique, éd. Verdier, 2012, p. 427.