Réductions matérielles et stratégies de poly-adaptation dans la scénographie. Workshop (La Fileuse, Reims)
Depuis quelques années, les politiques publiques et les acteurs culturels ont pris conscience de la nécessité d’inventer de nouveaux outils de production, de création et de diffusion afin de répondre aux impératifs du changement climatique. En région grand Est, le « Shift Project » ou l’axe 13 de la collaborative témoignent de cette nécessité de transformer les pratiques dans un sens plus éco-responsable. Mais qu’en est-il au sein des structures productrices de spectacles ? Que change la prise en compte du paradigme environnemental dans le développement de nos esthétiques ?
Forte de ces interrogations, la compagnie Galilée déploie en 2024, 2025 et 2026 un programme de recherche et création intitulé « Faire avec moins : pratiques et esthétiques de la réduction dans le spectacle vivant » : Faire avec moins, conduit en partenariat avec le Centre national des arts du cirque, l'Agence culturelle du grand Est, la Fileuse et l'associaiton ARTVIVA - Arts vivants, arts durables.
Ce programme de recherche, qui entend s’intéresser aux projets de ceux et celles qui, par ambition écologique ou par contrainte économique, tentent de « faire avec moins », comporte notamment un volet de réflexion sur les pratiques de réductions matérielles. Il ne s’agit pas, à travers cette initiative, de céder à une forme de fatalité misérabiliste, ni d’accepter une réduction des coûts, des temps de montage ou des temps de conception accordés à la scénographie, mais plutôt de réfléchir aux transformations en cours et de préparer au mieux l’avenir.
Afin de concevoir un projet scénographique ambitieux tout en consommant moins de matière, la compagnie Galilée a par exemple fait le choix de se lancer dans une stratégie de poly-adaptation et d’éco-conception de ses décors, conçus avec l’objectif de pouvoir être réemployés sur plusieurs pièces ou de pouvoir s’adapter plus facilement à différents espaces (scènes équipées et lieux non dédiés). Cette démarche n’est cependant pas sans poser quelques questions, que nous souhaiterions mettre au programme de ces trois journées collaboratives.
Objectif
Le workshop est conçu autour d’un défi scénographique. Il s’agira en effet pour les participant.e.s d’imaginer un projet d’adaptation d’une scénographie existante et conçue à l’origine pour des espaces équipés, en proposant un dispositif moins gourmand en matière et en volume, dont la vocation serait de pouvoir circuler dans des lieux non-dédiés.
Cette démarche est motivée par au moins deux aspects. Dans un contexte où les œuvres crées ne circulent généralement que très peu, il s’agit d’abord d’augmenter le potentiel de diffusion d’un même spectacle, afin de lui permettre de rencontrer un public plus large. Mais il s’agit aussi de s’interroger sur les limites de cette réduction : jusqu’où, en effet, peut-on réduire une scénographie (ou un projet de scénographie), sans trahir le geste artistique initial ? La version réduite de la scénographie poly-adaptée peut-elle conserver tout le sens et tout le plaisir esthétique de la version grand plateau, ou bien est-elle condamnée à donner lieu à une forme de « sous-spectacle » ? N’est-il pas nécessaire, dans ce processus de réduction, de rompre avec un désir de fidélité par rapport au geste initial, afin d’engager pleinement un nouveau processus de création, né de cette contrainte matérielle ?
Fonctionnement du workshop
Le workshop a lieu à la Fileuse, friche artistique de Reims, et est co-encadré par trois intervenant.e.s : Floriane Benetti, scénographe et décoratrice, membre de la Ressourcerie du cinéma, Romain Fohr, Maître de conférences à l’Université Sorbonne Nouvelle et spécialiste des questions de scénographie, et Nicolas Murena, metteur en scène, directeur artistique de la compagnie Galilée. Il accueillera jusqu’à six participant.e.s (plasticien.ne.s / scénographes / artistes), intéressé.e.s par les questions de scénographie et/ou d’éco-conception dans le spectacle. Une forte compétence professionnelle n’est pas nécessaire pour participer au projet, mais cette dernière sera malgré tout un élément d’appréciation au regard des autres candidatures.
Le premier jour du workshop sera essentiellement consacré à un tour de table sur les pratiques professionnelles de chacun.e, particulièrement dès lors que ces dernières engagent une réflexion sur l’éco-conception. Puis, les trois intervenant.e.s proposeront quelques éclairages sur les pratiques en cours ainsi que des pistes de travail.
Les deux journées suivantes seront ensuite consacrées à la conception des projets scénographiques, dans le cadre des objectifs définis ci-dessus. Afin de travailler dans de bonnes conditions, les participant.e.s pourront accéder au décor du projet source (imaginé pour une mise en scène de la pièce Les Enfants, de Lucy Kirkwood, et monté pour l’occasion), mais aussi à l’inventaire des matériaux ayant permis la réalisation de ce décor, dans une logique de réemploi.
Enfin, le workshop s’achèvera par une présentation des travaux réalisés.
Considérations pratiques et juridiques
La compagnie dispose d’une enveloppe afin de prendre en charge les frais annexes. Cette enveloppe permettra de défrayer en priorité les repas et le transport, et pourra s’étendre dans la mesure du possible aux frais d’hébergement. Aucune rémunération n’est en revanche prévue pour les 6 participant.e.s, dans la mesure où le workshop reste conçu comme un atelier coopératif sur les pratiques professionnelles.
Les participant.e.s s’engagent également à bien vouloir permettre la copie des croquis, plans ou dessins conçus pendant le workshop à des fins de restitution et de partage scientifique (présentation lors de journées de recherche, publication…) En contrepartie, la compagnie Galilée et la Fileuse s’engagent à ne pas faire usage de ces documents en dehors du cadre scientifique pour lequel ils ont été conçus. Dans le cas, cependant, où les décors imaginés viendraient faire l’objet d’un projet artistique concret, la compagnie s’engage à faire appel avant toute chose à l’artiste-concepteur.ice, dans une démarche de collaboration professionnelle, ainsi qu’à réaliser auprès de lui ou auprès d’elle la demande de droits d’auteur nécessaires.
Candidatures
Les candidatures sont à transmettre par mail à l’adresse suivante : contact@compagniegalilee.fr
Elles seront composées d’un simple exposé de ses motivations, accompagné d’une brève notice biographique faisant état du parcours professionnel ou étudiant. Dans ce but, une lettre de motivation formelle n’est pas nécessaire : un simple développement dans le corps de mail conviendra tout à fait.
Date limite de retour : 19 avril 2024.
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Esquisse bibliographique
Alternatives théâtrales : « La scénographie et les (trop) vastes enjeux de la transition écologique : La scénographie et les (trop) vastes enjeux de la transition écologique – Alternatives théâtrales (alternativestheatrales.be)
Peter BROOK, « Le théâtre brut », dans L’Espace vide, Éd. Seuil, coll. « Points essai », 2014, p. 91-129.
François DELOTTE, « Le collectif 17H25. L’éco-conception de décors d’opéra », AS-Actualité de la Scénographie, 2022.
Sandrine DUBOUILH, « La condition écologique. Les bonnes pratiques en scénographie, des solutions à un problème mal posé ? », Théâtre public, n°247, 2023.
Sandrine DUBOUILH et Rafaël MAGROU, Lieux de spectacle, architectures en devenir, Éd. Presses Universitaires de Bordeaux, 2022.
Romain FOHR, « Concevoir un décor écoresponsable au cinéma et au théâtre », Double jeu, 18 | 2021, p. 185-198.
Thierry LEONARDI, « Créer des décors dans un monde fini et sous contraintes », dans Rendre le spectacle durable pour rester vivant », Éd. La Scène, 2024, p. 60-65.
Thibault SINAY, « Poser un pied dans le réel des scénographes », dans Rendre le spectacle durable pour rester vivant », Éd La scène, 2024, p. 60-65.
Union des scénographes, « Manifeste de l’éco-scénographie » : UDS_Manifeste-de-léco-scénographie.pdf (uniondesscenographes.fr)
Antoine VITEZ, « L’abri ou l’édifice », dans Le Théâtre des idées, Éd. Gallimard, Coll. « Pratiques du théâtre », 2015, p. 88-93.